CRIS D’ALARME DE LA CROIX ROUGE ET DE L’EGLISE CATHOLIQUE EN FAVEUR DES DÉPLACÉS D’UBUNDU

Il est jeudi  21 février 2019. Nous sommes au Beach IAT à Ubundu, cité située à 128 km au sud de Kisangani. Les radeaux accostent avec à leurs bords des hommes, des femmes et surtout des enfants dont les visages traduisent l’amertume. Dans presque chaque embarcation, on remarque au moins deux femmes enceintes. D’autres arrivent sur des petites pirogues à pagaies. Ils proviennent de Masimango (60 km d’Ubundu) et LOWA (125 km) en amont du fleuve Congo. Ces deux localités connaissent des  crises depuis une semaine.

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Ces embarcations, faites des bambous liés par des lianes, exposent ces nombreux ménages des déplacés aux risques de naufrage. En aval du port de la SNCC, Société Nationale Congolaise des Chemins de Fer, il y a une rapide connue sous le nom de « Tubundubundu » et qui est très réputée pour sa dangerosité. Dans les rues, des femmes, des enfants et des jeunes, ustensiles de cuisines, matelas ou bidon d’huile à la tète, défilent à la recherche des familles d’accueil.

Dans les cours de nombreuses parcelles de la cité d’Ubundu, les déplacés s’installent donnant ainsi  l’image des parcelles en deuil. Seule la solidarité africaine fait encore vivre ces déplacés de conflits armés et coutumiers.

Au Beach IAT, seuls les éléments de la croix rouge accueillent les déplacés. Ils ne disposent même pas d’un comprimé pour les premiers soins. L’église Catholique s’est jointe à la croix rouge.

Depuis le mercredi dernier, le président de la Croix rouge Ubundu et l’Abbé Augustin YAFUFA de la paroisse Saint Joseph d’Ubundu mènent un plaidoyer auprès des autorités et autres personnes de bonne volonté pour assurer un minimum d’accueil et de sécurité aux déplacés.  Ils sont à la recherche d’un hors bord pour secourir les radeaux  qui se pointent afin d’éviter des noyades qui sont imminentes.

L’administrateur du territoire d’Ubundu, Rufin Simon PENZE, conscient de la situation, depuis le mercredi, se dit n’avoir pas des moyens matériels ou financiers pour faire face aux besoins de ces déplacés.

A LOWA, chef lieu du secteur Walengola Lowa, ce sont des milices locales, surnommés  « Les revendiquants, » qui assiègent la cité depuis le 13 février dernier. Selon le chef de ce secteur, Bushiri Mobandja, ces miliciens s’opposent à l’érection du parc de la Lomami qui s’étend dans trois provinces (Maniema, Tshuapa et une grande partie de cette forêt se trouve à la Tshopo). Les miliciens de ce nouveau groupe armé dans la province de la Tshopo prétendent possédés des forces mystiques qui le rendraient immortels face aux armes à feu même de guerre. Le chef de cette nouvelle milice « Les revendiquants » se surnomme « Portugais».

A Masimango, l’une des grandes agglomérations du territoire d’Ubundu, il s’agit d’un conflit coutumier entre deux familles régnantes qui a dégénéré jusqu’au recours aux armes de guerre, faisant ainsi des blessés et des déplacés.

Le secteur de Walengola LOWA compte 21 980 habitants qui seraient en fuite dans tous les sens. Certains ont pris la direction des villages de la province voisine de Maniema. Leur situation reste inconnue.

Le médecin responsable de l’hôpital de Masimango et deux membres de son personnel sont pris en otage affirme le médecin directeur ad intérim de l’hôpital général d’Ubundu, Jean ASUMANI.

Au chapitre de bilan provisoire, selon les statistiques de la croix rouge de ce jeudi soir, plus de trois milles déplacés sont arrivés à  Ubundu, dont plus de milles  femmes et 500 enfants de moins de 6 ans. Sept cents sont des  enfants dont l’âge varie entre 6 à 17 ans. Huit  déplacés sont tombés malades et sont internés l’hôpital général d’Ubundu avec des blessés de ces deux conflits.

Un bébé de moins de 5 mois est décédé la nuit du mercredi à jeudi, dans une famille d’accueil après avoir reçu une perfusion. On dénombre déjà des cas de  malnutrition. L’hôpital ne dispose ni de lait thérapeutique ni  le paquet chirurgical.

Le drapeau de la croix rouge flotte désormais devant l’hôpital général d’Ubundu. Il a rôle de signaler les déplacés qui devront se faire enregistré.

Risque d’une crise tribale

Une crise entre les deux grandes tribus serait imminente dans le territoire d’Ubundu. A en croire les différents témoignages recueillis sur place. Les lengola se disent être victime de la part de mituku.

Pour le chef de secteur Walengola Lowa, c’est depuis le 13 février que les miliciens « le revendiquant » occupent son entité. Trois jours avant, ces miliciens, qui viennent des secteurs voisins de Mituku Basikate et Mituku Bamoya, ont provoqués les militaires en poste dans son secteur à la périphérie de Lowa. Ils ont grièvement blessé un élément des FARDC à coups de machette. Ce dernier est décédé lors de son transfert à Ubundu.

« Nous avons tout abandonné. J’avais des paddy entrain d’être usiné à la rizerie. Avec mes 6 enfants et mon épouse enceinte, on se retrouve ici sans un lendemain rassurant. Juste parce que certains individus ne s’attendent pas chez eux, mais ont nous soumet dans ces genres de traitement inhumain « , raconte un autre déplace à la 4e avenue sur place à Ubundu.

Un des infirmiers de l’hôpital général d’Ubundu vit en clandestinité. De gens se sont présentés chez lui pour se venger car le chef coutumier qui a occasionné le déplacement massif des populations à Masimango est son oncle.

Un enseignant qui est parmi les déplacé a été arrêté à son arrivé au Beach. On a retrouvé dans ses effets des correspondances avec le chef qui s’oppose à l’affectation de son successeur par Kinshasa.

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Un papa d’environs 70 ans, infirme de son état, qu’on a rencontré ce jeudi matin à l’hôpital d’Ubundu avec sa jambe gauche grièvement touché par balle, affirme qu’on lui a tiré deux coups de balles parce qu’il a des liens de  parenté avec le chef qui revendique sa trône.

Le prêtre catholique a exprimé les craintes d’une vengeance probable des lengola. « Le matin après la messe, certains de nos chrétiens se disent en avoir assez avec les actes de violence de la part de leurs ‘frères mituku. Je suis arrivé au point de les inviter à pardonner », fait savoir l’abbé Augustin Yafufa.

Très peu d’information sur la situation a Masimango et Lowa.

À Lowa, l’un des  déplacés qui sont arrivés le mercredi en début d’après midi, a indiqué à actualité.cd  qu’ils ont entendu de détonations à Masimango. « J’apprends aussi auprès d’un autre déplacé qu’ils tirent sur  toutes feuilles qui bougent. Car ces gens prétendent être  invulnérables face à la puissance de l’arme à feu », rapporte un agent de l’administration territorial qui héberge des déplacés chez lui.

Ce jeudi matin, les conversations dans les rues d’Ubundu sont dominées par les succès qu’auraient connues l’offensive des FARDC à Lowa. Un élément de la PNC qui revenait du Beach IAT vante les prouesses des FARDC déterminées à poursuivre les miliciens jusqu’à leur dernier retranchement.

Selon la RTNC captée ce soir à Kisangani, les FARDC auraient déjà récupéré certains villages d’entre les mains des  gens que les élus provinciaux du territoire d’Ubundu appellent des bandits.

Ernest MUKULI

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