L’article de Martin ABIBI Zabi, intitulé : Un Accord de Paix sous le Prisme du Pouvoir : Les Paradoxes Révélés, propose une analyse approfondie de l’accord de paix signé à Washington le 27 juin 2025 entre la République Démocratique du Congo (RDC) et la République du Rwanda. L’auteur utilise la méthodologie de l’ABC du Pouvoir de P.F. Tenière – Buchot, une approche visant à décrypter les mécanismes de pouvoir dans des situations complexes ou conflictuelles, notamment via l’outil du tablier des pouvoirs. Cette analyse révèle que le discours officiel de l’accord pourrait masquer ou protéger; des actions sous-jacentes et des dynamiques de pouvoir complexes.
Les Paradoxes au Cœur de l’Accord
L’article identifie plusieurs injonctions paradoxales et paradoxes de la prévision qui complexifient la mise en œuvre de l’accord :
- Le Paradoxe de la Résolution Politique par des Moyens Militaires : L’accord promeut une résolution politique négociée mais repose en réalité sur un concept d’opérations militaire détaillé (le CONOPS) pour la neutralisation des FDLR. Ce paradoxe montre comment le discours de la résolution politique protège l’action militaire, masquant la violence sous des termes diplomatiques et créant une confusion entre le fond et la forme.
- Le Paradoxe du Soutien aux Négociations avec des Groupes Armés et l’Interdiction de les Soutenir : L’accord exige le plein soutien aux négociations RDC-AFC/M23, tout en interdisant aux parties de ne fournir aucun soutien à de telles activités à l’étranger concernant des groupes armés. Cette injonction paradoxale enferme les acteurs dans une contradiction où ils doivent soutenir un processus impliquant des entités dont ils ne sont pas censés soutenir les activités, ce qui peut rendre l’autre ou le paralyser.
- Le Paradoxe de l’Intégration Conditionnelle des Combattants dans les Forces de Sécurité : l’accord prévoit l’intégration de combattants dans les FARDC et la PNC sous des conditions rigoureuses, y compris la loyauté envers l’État. Or, ces combattants ont pu mener des hostilités incompatibles. Cela crée une incitation paradoxale; où la déstabilisation de l’État pourrait devenir une voie vers la légitimité. C’est une manifestation du paradoxe du piège, où l’intégration, censée pacifier, est détournée pour assurer la stabilité par absorption des menaces, quitte à transiger sur les principes.
- Le Paradoxe de la Transparence Économique pour Bloquer les Canaux Illicites : L’accord vise à introduire une plus grande transparence dans le commerce des minerais critiques pour bloquer les canaux illicites et promouvoir la prospérité. Cependant, l’article suggère un paradoxe de la prévision : l’annonce d’une telle solution pourrait entraîner une reconfiguration des canaux illicites sous un nouveau contrôle, plutôt que leur éradication. Le discours de la prospérité et de la transparence agit alors comme un discours de diversion pour potentiellement légitimer de nouvelles formes de contrôle sur ces ressources clés.
- Le Paradoxe de l’Observation Impartiale par le Mécanisme Conjoint de Coordination de la Sécurité (JSCM) : Le JSCM, chargé de la transparence et de la vérification des opérations contre les FDLR, est composé des parties elles-mêmes, avec des observateurs tiers sans obligations définies. Le paradoxe réside dans le fait que les acteurs sont à la fois juges et parties, ne pouvant être objectivement neutres. Cela peut mener à une surinterprétation, informations ou une manipulation par le discours oral transformant la transparence en un outil de contrôle ou de légitimation des actions des parties impliquées.
En somme, l’accord RDC – Rwanda, analysé à travers l’ABC du Pouvoir est un document complexe qui tente d’imposer un ordre ; mais contient des contradictions profondes, révélatrices de la nature souvent duplice du pouvoir. Le tablier des pouvoirs aide à décrypter ces dynamiques, où le discours ne décrit jamais l’action mais la protège. La réussite de l’accord ne dépendra pas seulement de la mise en œuvre de ses dispositions, mais aussi de la capacité des Parties à naviguer et à exploiter ces paradoxes pour maintenir ou modifier les rapports de force dans un jeu dont les règles sont moins transparentes qu’il n’y paraît.
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Un Accord de Paix sous le Prisme du Pouvoir Les Paradoxes Révélés