Le peuple d’abord !

Slogan cher au Sphinx de Limété, repris par son fils, cette phrase semble vidée de toute sa substance vitale, de tout son sens et a perdu sa philosophie de départ.

Depuis plus de trente et cinq ans, ce slogan a été le refrain du plus grand parti de l’opposition.

« D’abord » revêt un sens très simple. Cela veut dire « en premier lieu » ; « au préalable ».

Tel que compris par plus d’une personne, cette expression voudrait dire que le peuple est mis au centre de toute préoccupation. L’on est poussé à croire que son initiateur voulait expliquer le sens de sa lutte pour l’avènement de la démocratie. Celui de travailler pour le peuple.

Autant dire tout de go que, pour Etienne Tshisekedi, tout son combat devait déboucher sur le bonheur du peuple zaïro – congolais, sur le bien – être de cette population meurtrie depuis des années.

A la mort de celui qui a privé, par moments, Mobutu d’un sommeil calme et serein, son fils reprend en chœur ce slogan.

Quoi de plus normal, car il a hérité et le trône et le parti de l’opposant historique.

Un héritage lourd à porter et, peut être, pas compris.

Le peuple d’abord voudrait que le congolais mène une vie décente

Que le congolais trouve son pain régulièrement sans tenir compte du fameux « article 15 ».

Que le congolais puisse avoir accès aux soins de santé primaire, à l’éducation

Que le congolais soit fier d’être congolais

Que l’électricité et l’eau ne constituent plus un casse tête

Que le congolais se sente sécurisé dans son pays et non constituer un champ de carnage sur son propre sol.

Que …que … que …

Ou alors le peuple d’abord était juste un slogan flatteur pour accéder au pouvoir !

Un slogan chanté et lancé à tout bout de champ pour s’attirer la sympathie du congolais !

Un refrain repris en chœur par les adeptes d’un parti qui se cherchait encore !

Avant 2018, tout congolais a compris que la quintessence de cette devise ne pouvait être réalisée, car le parti n’était pas au pouvoir. Evident, car sans moyens conséquents, pas de politique efficace.

2018, le fils à son père prend le pouvoir et, sans hésiter, entonne son refrain : le peuple d’abord.

Au fut et à mesure que les années passent, le slogan s’éloigne de plus en plus de sa logique de départ et perd toute son essence.

Le peuple d’abord semble s’appliquer uniquement à ce qui est nuisible pour le peuple.

Famine, le peuple d’abord

Chômage, le peuple d’abord

Pauvreté, le peuple d’abord

Misère, le peuple d’abord, etc.

Pourquoi ne pas dire tout simplement « les autorités d’abord » ?

Ceci semble plus correct.

Quand le peuple ne sait pas manger à sa faim, ils nagent dans l’opulence.

Quand le peuple ne sait pas scolariser ses enfants, ils envoient les leurs dans les écoles les plus luxueuses de la planète.

Quand le peuple ne sait pas se protéger, ils s’entourent des gardes rapprochées.

Quand le peuple n’a pas accès à l’eau potable et à l’électricité, ils enrichissent les usines qui fabriquent les groupes électrogènes et le système solaire.

Quand le peuple pleure et enterre ses morts, ils font couler, à flot, le champagne.

Quand le peuple ne sait pas soigner ses malades, ils optent pour des soins à l’étranger.

Quand le peuple ne perçoit pas son dû, les détournements deviennent, pour eux, la meilleure voie pour s’enrichir.

Quand la loi, qui est censée s’appliquer à tout le monde, ne concerne que le bas peuple, ils sont quasi exemptés, appliquant, sans nul doute, le principe selon lequel « l’exception confirme la règle ».

Quand le peuple n’a pas de toit, ils construisent ailleurs.

La sanction populaire existe et elle sera, peut être, appliquée si ce même peuple prend conscience de la situation dans laquelle il se trouve.

Mais, en attendant, « les autorités d’abord ».

Ma Glorie BOLUNDA