
Magistrature : au-delà de la pluie d’ordonnances…
Une pluie d’ordonnances sur la magistrature. L’appareil judiciaire vient de connaitre des mouvements sans précédent. Plus de six heures de lecture sur les antennes de la télévision d’Etat ! C’est dire. Nominations à tous les étages juridictionnels, révocations et mises à la retraite des magistrats.
Qui trouverait à y redire si ce » tsunami » rimait avec salubrité judiciaire ? Qui s’en plaindrait si le magistrat suprême amorçait, quoi qu’au crépuscule de son mandat, la croisade pour le redressement d’un secteur miné par plusieurs maux que les mots ne suffisent plus à décrire ?. La justice ayant cessé d’être …juste depuis des lustres ! Nombre de professionnels du droit ayant cessé d’être droits dans leurs toges.
Difficile, dans ces conditions, de valider le verset biblique niché dans Proverbes 14 :34 à savoir » la justice élève une nation « .
Rassasiés d’annonces et d’effets d’annonces -jusqu’à atteindre l’overdose -, les Congolais attendent de voir si la Justice va enfin redevenir juste. Va-t-on enfin assister à la » mort » de la justice à géométrie variable, selon la poche du justiciable ? En la matière, le changement ne se chante pas, il se constate.
En l’occurrence, il ne suffit pas de faire le ménage dans l’appareil judiciaire et même de nettoyer toutes les écuries au karcher pour obtenir une magistrature plus blanche que la neige. Encore faudra-t-il améliorer substantiellement les conditions de travail et de vie de l’homme chargé de dire le droit. Le magistrat n’échappe pas à la célèbre citation de Jean-Jacques Rousseau à savoir qu’il est né bon mais c’est la société qui le corrompt. Il est jusqu’à Aristote pour soutenir que la vertu s’entretient.
Comment rêver d’une justice…juste tant que les cours et tribunaux continuent à être perçus non pas comme un pouvoir distinct et indépendant de deux autres, mais comme l’appendice de l’Exécutif ? Comment parvenir à un maillage territorial efficient et efficace en terme de déploiement des toges noires, si le magistrat affecté en provinces ne trouve même pas un minimum requis de décence pour travailler et encore moins vivre ? Comment espérer casser le cercle vicieux de la précarité au profit du cycle vertueux du progrès au sein de l’appareil judiciaire aussi longtemps que les magistrats sont pris socialement en charge par des justiciables ?
Sans une requalification de l’ordinaire du magistrat et de son cadre de travail, la pluie d’ordonnances qui s’est abattue toute la nuit jusqu’aux aux aurores sur l’appareil judiciaire sonnera comme une symphonie inachevée.
José NAWEJ