L’hydre…rwandaise (Tribune de José Nawej)

Les Congolais ont appris à se méfier du Rwanda officiel comme de la peste. Ils ont mille fois  raison.  Chat échaudé  craint l’eau froide. En matière d’agressions, Bunagana survient  bien après  la goutte d’eau qui a débordé le vase. C’est dire.

 L’occupation de cette bourgade stratégique à quelques encablures de la frontière avec l’Ouganda est juste un avatar de la tragédie «  Une saison au Congo  » débutée voici 25 ans. Depuis, que de morts ! Six millions au bas mot. Que de femmes violées ! Que de ressources naturelles pillées ! Le Rwanda est  même devenu exportateur des minerais  que son sous-sol aussi ingrat qu’exigu ne contient pas.

Pour autant,  devrions-nous voir Kigali ou son ombre dans et derrière toutes nos crises ? En l’occurrence, à Kwamouth et même à la frontière commune avec la République centrafricaine ? Possible,  eu égard à la capacité de nuisance du Pouvoir rwandais.

 Cette  propension à attribuer toutes nos déconvenues sécuritaires comporte, cependant, un double risque. D’une part, elle exonère la classe dirigeante de l’incurie proverbiale qui est la leur sur le front du maillage  sécuritaire, judiciaire, administratif du territoire. Le fameux déficit de l’autorité de l’Etat que l’on vit dans sa chair  à mesure que l’on s’éloigne de Kinshasa. Ou quand  on habite en dehors de certaines grandes villes du pays.

D’autre part, sur le plan psychologique, voir le Rwanda partout équivaut à  essentialiser ce pays comme étant supérieur à la RDC. Ainsi, Kigali aurait vocation à déstabiliser ad vitam aeternam Kinshasa. Et les Congolais resteraient dans le rôle d’éternels pleurnichards face à l’ogre rwandais.

  Cela fait déjà un quart de siècle, soit une génération entière, que cette agression-domination rwandaise est récitée à longueur de journée. Ceux des Congolais nés dans la seconde moitié des années 90 n’ont du Rwanda que la perception du pays agresseur, donc plus «  fort  » que la mère-patrie.

   Un coup d’œil même furtif sur la carte donne le tournis.  Avec en bulle un tableau où paradoxe et oxymore sont rois : un pays- continent  de plus de deux millions de Km² habité par près de 100 millions d’âmes  continuellement agressé par son  voisin   80 fois plus petit !

De quoi se faire retourner dans leurs tombes tous les hérauts et héros de la géopolitique.

José NAWEJ

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